Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le journal FICTIF de Zoé Bergeret

Première semaine d'Avril

30 Octobre 2011 , Rédigé par Zoé Bergeret

 

Vendredi 1er Avril 2011

 

Trouvé, ce matin, sur le blog l’autofictif de Chevillard qui me sert de portail d’entrée sur Internet, :

« Commentaire d’un lecteur de Bouvard et Pécuchet sur le site d’une librairie en ligne : Ce qui est admirable dans cette histoire c'est l'amitié entre ces deux hommes d'un certain âge qui se retirent pour tout apprendre, tout essayer. Mais le gros défaut, c'est cette volonté encyclopédique qui pousse Flaubert à être exhaustif. C'est finalement rébarbatif. Du coup, pas de quartier, trois étoiles sur cinq possibles. Bien sûr, n’importe qui est autorisé à penser n’importe quoi de toute chose et l’on peut aussi à bon droit reprocher à l’asperge de n’être pas un salsifis. »

 

J’ai cherché ce site et ce commentaire. Cela a été assez rapide : ayant demandé la recherche de Bouvard et Pécuchet  à Google, j’ai opté pour le résultat amazon et bien m’en a pris.

Grâce à cette recherche, j’ai découvert un article de Maupassant sur un site fort intéressant, article et site  que j’ai signalés à Lucien.

 

J’ai trouvé, toujours pour Lucien, mais cette fois pour sa « mémoire de lecteur », un extrait de Jules Renard parlant de Poil de Carotte.

 

Je poursuis la transcription de la lettre de ma « tante »  qui me parait de plus en plus suspecte.

Disons que Lucien et moi avons facilement acquis la certitude de l’imposture.

Mais poursuivons et nous verrons :

 

Je sais que, de tout cela, vous n’avez jamais entendu reparler, Que Paul n’a plus jamais parlé de son frère, qu’il a interdit qu’on vous en parle ; tout cela, je le sais par votre tante Berthe.

J’ai su la mort de Paul, celle de Berthe ; dernier témoin de cette histoire, j’ai pensé que vous aviez le droit de savoir et que j’étais votre dernière chance et que le temps m’était compté ; pour cela, j’ai pris la décision de t’écrire tout ce que je sais ; pourquoi à toi, ma petite Zoé, plutôt qu’à Lucien ? Un réflexe naturel de vieille dame qui se sentira toujours plus à l’aise avec une autre femme.

La rupture des deux frères a eu une double raison, une raison immédiate, un conflit d’intérêt et une raison plus ancienne qui paraissait oubliée, qui a ressurgi  à cette occasion et où je fus malheureusement « celle par qui le scandale arriva ».

 

 

Je pense que ce sera tout pour aujourd’hui : je sors jusqu’à ce soir et n’aurai guère de temps à consacrer aux élucubrations de celle qu’il me plait, malgré tout, d’appeler « tante Jeanne ».

 

Samedi 2 Avril 2011

 

Ne jamais oublier que Paul Claudel écrivit ceci en 1940 :

 

« La France est délivrée après soixante ans de joug du parti radical et anticatholique (professeurs, avocats, Juifs, francs-maçons). Le nouveau gouvernement invoque Dieu et rend la Grande Chartreuse aux religieux. Espérance d'être délivré du suffrage universel et du parlementarisme. »

 

 

Suite de la lettre de « tante Jeanne » qui contient un indice irréfutable de son imposture :

 

La rupture des deux frères a eu une double raison, une raison immédiate, un conflit d’intérêt et une raison plus ancienne qui paraissait oubliée, qui a ressurgi  à cette occasion et où je fus malheureusement « celle par qui le scandale arriva ».

Ici, il me semble nécessaire de commencer mon récit à son commencement, c’est-à-dire en Décembre 43. Ton oncle Gabriel et moi étions alors à l’Ecole Normale, c’était notre première année. Nous nous « fréquentions » comme on disait alors. J’avais obtenu de mes parents l’autorisation—je n’avais pas dix-huit ans et, à cette époque et pour longtemps encore la majorité ne s’obtenait pas avant vingt et un ans--, j’avais donc l’autorisation, car ils avaient en moi toute confiance, de passer la soirée et la nuit de Noël—à ce moment-là, en pleine occupation, avec le couvre-feu, la soirée impliquait toute la nuit, bien évidemment-- dans la famille de ton oncle Gaby. C’est là que je rencontrai  Paul pour la première fois. Veuf, un peu mélancolique, genre « beau ténébreux » de cinéma, il ne pouvait manquer d’éveiller l’intérêt d’une adolescente romantique et, il faut le dire, un peu niaise.

 

Dimanche 3 Avril 2011

 

Charlotte est rentrée hier soir.

 

Nous avons fêté son retour ; un peu trop peut-être. J’ai dormi la plus grande partie de la journée.

 

Je reprendrai demain la transcription des élucubrations de « notre tante » qui en est à nous décrire ses amours avec mon père et mon oncle inventé selon la tradition de Jules et Jim.

On en reparlera.

 

Lundi 4 Avril 2011

 

Lu ce matin chez Chevillard :

 

Il alla chercher la sagesse jusqu’en Orient et, lorsqu’enfin il parvint au détachement suprême qui lui fit mépriser la gloire, les honneurs et toute forme de reconnaissance, il dut reconnaître qu’il se moquait aussi de l’amour désormais, qu’il n’avait plus de goût pour le chocolat liégeois et que la vie en somme lui semblait une plaisanterie un peu longue et fastidieuse.

 

La suite de la lettre de « tante Jeanne » qui, d’après mes premiers déchiffrages, tente de nous vendre un croisement de Jules et Jim et de L’armée des ombres me demande beaucoup de temps : sa calligraphie ne rend pas la lecture facile mais surtout j’essaie de contrôler la vraisemblance historique de son récit ce qui me ralentit beaucoup. Au moins, tout cela m’aura permis d’acquérir  une petite culture sur la période 40-45.

Pour l’instant, je n’ai noté dans son récit que deux erreurs.

Croire que nous goberions le nouveau frère de notre père sans aller vérifier les papiers de famille et que nous ne trouverions pas le livret de famille qui établit que Pierre-Jules Bergeret et Simone née Thibault n’ont eu d’autre enfant que Paul, né en 1918 et Berthe née en 1922 était un peu naïf « tantine » !

Et prétendre que vous étiez entrés à l’Ecole Normale d’instituteur en 1943 alors qu’elle avait été supprimée par Pétain dès 1940 !

 

Cette suite viendra. Qu’on me laisse un peu de temps.

 

Mardi 5 Avril 2011

 

J’ai été fort occupée aujourd’hui : rendez-vous en ville pour une affaire de famille, préparation du repas.

 

J’essaie, pour la lettre de « ma tante », une police plus proche de sa véritable écriture mais nettement plus lisible :

 

Ma petite Zoé,

Te souviens-tu de nos promenades dans les bois de M…. ?

Te souviens-tu seulement de Jeanne, « tante Jeanne »  pour toi?

Tu étais si jeune, nous nous sommes perdues depuis si longtemps, que je t’appelle encore « ma petite Zoé », bien que tu sois probablement bien près des soixante-dix, peut-être même les as-tu déjà. Si je me rappelle bien, tu n’avais que quinze ans de moins que moi et me voilà octogénaire depuis cinq ans.

J’avais vingt deux ans la dernière fois que je t’ai vue ; il me semble bien que tu venais d’en avoir cinq ; finalement, ce serait dix-sept ans de différence et cela te ferait soixante et huit ans. Je me trompe ?

C’était le printemps quarante-huit.

Mon Dieu ! Que c’est loin tout ça !  Gabriel était parti chez le notaire avec ton père ; j’étais restée pour garder « les petits », ma présence là-bas étant inutile ; je n’étais après tout qu’une pièce rapportée.

J’aimais bien vous garder ; vous étiez si sages, toi surtout, ma petite Zoé.

Ce jour-là, il faisait un temps magnifique, un vrai temps de printemps, un peu chaud, comme il arrive souvent en Mai ; je vous ai amenés au bord de la rivière où nous avons pique-niqué ; peut-être te rappelles-tu tout cela.

Ce que tu ne sais probablement pas c’est que Gabriel et Paul  devaient nous y rejoindre et ne sont jamais venus.

Que tout cela est loin ! Et cependant, je revois tout comme si nous le vivions encore : la belle journée, le retour, vous si joyeux, moi un peu inquiète de leur absence, l’arrivée chez Paul. Evidemment, tu ne peux pas te rappeler tout cela, Gabriel dans la voiture, prêt au départ, Paul qui sort de la maison dès qu’il entend vos rires, qui vous entraine, mon désarroi, Gabriel qui me fait signe de montrer dans la voiture, ma courte hésitation, notre départ.

Je sais que, de tout cela, vous n’avez jamais entendu reparler, Que Paul n’a plus jamais parlé de son frère, qu’il a interdit qu’on vous en parle ; tout cela, je le sais par votre tante Berthe.

J’ai su la mort de Paul, celle de Berthe ; dernier témoin de cette histoire, j’ai pensé que vous aviez le droit de savoir et que j’étais votre dernière chance et que le temps m’était compté ; pour cela, j’ai pris la décision de t’écrire tout ce que je sais ; pourquoi à toi, ma petite Zoé, plutôt qu’à Lucien ? Un réflexe naturel de vieille dame qui se sentira toujours plus à l’aise avec une autre femme.

La rupture des deux frères a eu une double raison, une raison immédiate, un conflit d’intérêt et une raison plus ancienne qui paraissait oubliée, qui a ressurgi  à cette occasion et où je fus malheureusement « celle par qui le scandale arriva ».

Ici, il me semble nécessaire de commencer mon récit à son commencement, c’est-à-dire en Décembre 43. Ton oncle Gabriel et moi étions alors à l’Ecole Normale, c’était notre première année. Nous nous « fréquentions » comme on disait alors. J’avais obtenu de mes parents l’autorisation—je n’avais pas dix-huit ans et, à cette époque et pour longtemps encore la majorité ne s’obtenait pas avant vingt et un ans--, j’avais donc l’autorisation, car ils avaient en moi toute confiance, de passer la soirée et la nuit de Noël—à ce moment-là, en pleine occupation, avec le couvre-feu, la soirée impliquait toute la nuit, bien évidemment-- dans la famille de ton oncle Gaby. C’est là que je rencontrai  Paul pour la première fois. Veuf, un peu mélancolique, genre « beau ténébreux » de cinéma, il ne pouvait manquer d’éveiller l’intérêt d’une adolescente romantique et, il faut le dire, un peu niaise.

 

 

Mercredi 6 Avril 2011

 

Marche ce matin avec Charlotte.

Le dernier billet d’Assouline m’a donné envie de me procurer le dernier Eco.

 

J’ai réussi à transcrire quelques lignes supplémentaires de « ma tante » où le roman-feuilleton prend forme et qui nous conduira sous peu, je vous le promets, à un épisode « Jules et Jim »:

 

Ici, il me semble nécessaire de commencer mon récit à son commencement, c’est-à-dire en Décembre 43. Ton oncle Gabriel et moi étions alors à l’Ecole Normale, c’était notre première année. Nous nous « fréquentions » comme on disait alors. J’avais obtenu de mes parents l’autorisation—je n’avais pas dix-huit ans et, à cette époque et pour longtemps encore la majorité ne s’obtenait pas avant vingt et un ans--, j’avais donc l’autorisation, car ils avaient en moi toute confiance, de passer la soirée et la nuit de Noël—à ce moment-là, en pleine occupation, avec le couvre-feu, la soirée impliquait toute la nuit, bien évidemment-- dans la famille de ton oncle Gaby. C’est là que je rencontrai  Paul pour la première fois. Veuf, un peu mélancolique, genre « beau ténébreux » de cinéma, il ne pouvait manquer d’éveiller l’intérêt d’une adolescente romantique et, il faut le dire, un peu niaise.

Dès le premier regard, je ne vis plus que lui et je dois à la vérité de dire que ce fut réciproque ; c’était, à n’en pas douter, ce coup de foudre dont je croyais l’existence réservée au cinéma et à la littérature pour demoiselles pales comme l’a nommée quelqu’un dont le nom m’échappe pour l’instant. Je ne luttai pas, lui non plus, « je fus toute à lui » comme on peut le lire dans le genre de romans roses dont je te parlais à l’instant. Quand il me dit son appartenance au « parti » et à la Résistance, …..

 

Note postérieure (du 28 Octobre 2011)

J’ai acheté et lu le dernier Eco, c’est-à-dire Le cimetière de Prague.

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article